18 février 2006

(BD) Les Fils d'Octobre

Nikolaï MASLOV signe son deuxième album. Pour ce faire, il a bénéficié d'une résidence d'un an à la Maison des Auteurs d'Angoulême, avant de repartir auprès de ses proches en Sibérie.

Le cadre dans lequel se déroule l'action dans ce volume est sensiblement identique à celui d'Une jeunesse soviétique : c'est la Sibérie profonde, ses campagnes enneigées abandonnées par le temps, ses baraques miteuses à l'intérieur desquelles on ne trouverait plus q'un vieux canapé, un poêle, un fourneau hors d'usage, deux buches de bois humide et une petite vieille alitée.

Maslov fait ici une sorte de recueil de nouvelles, qui est comme un recueil d'impressions sur cette région qui lui est chère en même temps qu'elle continue de l'effrayer. Il insiste énormément sur l'alcoolisation des dernières générations de paysans. Un peu trop sans doute, car on éprouve presque de l'ennui à constater que les deux premières histoires de l'album ont le même thème. Le dessin, au trait toujours aussi improbable tant il ne semble pas professionnel, atteint pourtant une qualité et un dégré de suggestion poétique encore accru par rapport au premier volume.

Mais l'ennui fait partie de la Sibérie, et donc il fait partie du jeu entre Maslov et son lecteur. Il y a de l'ennui, oui, durant les 96 pages du volume. Tout comme il y a de vastes étendues blanches, qui nous semblent toutes identiques, des arbres morts, des cabanes, des paysans alcooliques. Oui, Maslov arrive à nous faire croire que c'est cela, la Sibérie.

Par contraste, l'histoire intitulée "Deux gars du pays" m'a paru la plus belle, parce qu'elle donne à voir plus de deux pages de plans urbains absolument silencieux, sans commentaire, avant de revenir dans le nulle part perpétuel des wagons transibériens. Austère et sublime, à l'image du personnage du chef qui reste muet comme une carpe, jusqu'à ce que son humanité soit touchée par un geste irraisonnable du personnage narrateur.

Un journaliste de "Marianne" a déclaré que ce volume était à découvrir de toute urgence. Je pense au contraire qu'il n'y a aucune urgence, parce que les deux volumes de Maslov, bien qu'ancrés tous deux dans la grande Histoire, échappent complètement à toute temporalité. A l'occasion, jetez-y un oeil attentif malgré tout.


96 pages, éd. Denoël Graphic - 19 € env.
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Nikolaï MASLOV, Une jeunesse soviétique

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