(BD) Les 7 boules de cristal
Mais au fait, aurais-je oublié de vous dire que j'ai relu un album de Tintin ? Je suis décidément en plein revival de la B.D. !
Les 7 boules de cristal se déroule en partie à Saint-Nazaire, sur les docks, et c'est en partie pour cela que j'ai acheté le volume, pourtant facile à trouver dans la bibliothèque des parents, dans la médiathèque du quartier, dans les C.D.I. Pas folles, et conscientes de leur patrimoine, les éditions Casterman proposent au moins trois éditions des Aventures de Tintin dessinées par le mythique HERGE (1907-1983), l'auteur belge francophone : une édition classique à prix moyen, une édition de luxe ("fac similé" de l'édition originale), et cette édition, au format et au prix réduits. La troisième solution est assez sympathique lorsqu'on désire avoir chez soi, sans débourser une fortune, quelques classiques de la B.D. A quand de telles initiatives pour d'autres œuvres incontournables, en particulier les B.D. de chez Dupuis ?
L'HISTOIRE : Lors d'un périple au Pérou et en Bolivie, des archéologues européens ont retrouvé la momie de l'Inca Rascar Capac. On l'apprend, comme souvent dans Tintin, par un extrait de journal dès la troisième case. En bas de la première page, toute l'intrigue est déjà annoncée, ou presque : Rascar Capac, comme Tout-Ankh-Amon, a fait graver sur son tombeau une malédiction qui ne va pas tarder à se manifester sur les archéologues venus le piller.
Tintin rejoint le capitaine Haddock et le professeur Tournesol à Moulinsart. En un rien de temps les archéologues tombent comme des mouches et la radio, le journal l'annoncent en cœur. Dupond et Dupont sont appelés à la rescousse, mais se montrent incompétents, comme à leur habitude. C'est donc à Tintin, assisté du capitaine Haddock, de résoudre l'affaire à sa manière, et d'apporter un peu de rationnel dans cet univers de superstition. Poursuivant des malfrats sous le motif qu'ils ont des visages d'étrangers, Tintin et Haddock arrivent donc à Saint-Nazaire en cabriolet jaune. Les Nazairiens reconnaîtront l'image qui sert aujourd'hui de panneau de "Bienvenue" à l'entrée de leur ville. Mais au final l'enquête fait chou blanc sur les docks de la Loire, et c'est à La Rochelle que nos deux héros retrouvent la piste qu'ils suivaient depuis Moulinsart. L'épisode se termine sur une injonction de l'auteur et de son éditeur : « Lisez la suite dans LE TEMPLE DU SOLEIL ».
J'avais essayé il y a deux ou trois ans de relire L'Oreille cassée, mais le volume m'était tombé des mains : trop de personnages, trop de texte... et des habitudes de lecture qui ont bien changé depuis l'enfance, où Tintin, Gaston, Astérix et autres Boule et Bill se lisaient sans difficultés par séries entières. Ici aussi, les premières pages surprennent, et font dire que la B.D. a bien évolué depuis Hergé. Les aventures de Tintin sont sans doute avant tout des récits mis en image. Le texte y est primordial, le dessin accessoire. Ça peut sembler un paradoxe, puisque d'aucuns ne jurent que par l'esthétique de Hergé, et font de lui un visionnaire lorsqu'il emmène ses héros sur la Lune en 1953, soit quatre ans avant le lancement de Spoutnik par les Soviets.
OUI, le dessin de Hergé est esthétique et efficace, mais tellement moins artiste et moins novateur que celui d'un Hugo Pratt (1927-1995). Hergé s'attarde avant tout à raconter, et ne s'en cache pas. Les Aventures de Tintin sont composées comme des nouvelles policières à héros récurrents : souvent attachées à des faits divers plus ou moins réels, elles ont pour principe la résolution d'une intrigue, la rationalisation scientifique des superstitions. Elles s'appuient sur un sentiment de fierté européenne, bien disparu depuis, et si elles illustrent un certain cosmopolitisme, c'est sans se départir pour autant d'un point de vue ethnocentrique : l'homme européen EST l'homme civilisé : il possède la science, la logique et la presse.
A condition d'être encore capable de lire des B.D. écrites, relire Tintin est, au-delà de toute considération historique ou politique, un petit plaisir auquel on se laisse aller comme à la dégustation d'une petite madeleine trempée dans du thé : le gâteau est devenu un peu lourd avec le temps, mais il garde le goût inimitable des plaisirs découverts dans l'enfance. Grâce à lui se redéploient tellement de moments agréables passés à lire des B.D., assis, couchés, debouts ou bien recroquevillés ; fatigués des adultes, isolés en nous-mêmes...
Rappelez-vous de Tintin, de Gaston et des autres : nous étions enfants et nous adorions ça.
62 pages, éd. Casterman - 5,95 €
5 commentaires:
Sans rire, tu vas vraiment nous faire une chronique sur Tintin ? J'ai hâte de voir ça...
Vous en seriez bien incapables, hein, vous les deux intellos de la B.D. branchouille ! ?
:p
Bonjour Nicolas,
Je trouve très intéressant le commentaire que tu fais. Les 7 boules de cristal fut mon premier ouvrage de Tintin. 25 ans après je ne sais pas si je pourrais le relire... Etrange.
Très intéressante ta sentence :
Elles s'appuient sur un sentiment de fierté européenne, bien disparu depuis, et si elles illustrent un certain cosmopolitisme, c'est sans se départir pour autant d'un point de vue ethnocentrique : l'homme européen EST l'homme civilisé : il possède la science, la logique et la presse.
Est-ce une lointaine influence de la polémique sur Tintin au Congo? Le propos paraît moins évident dans les 7 boules de cristal ... du moins dans le souvenir que j'en ai. Une relecture s'imposerait peut-être...
Bjour et merci de ton commentaire !
Je ne veux pas condamner Herge sur la relecture d'un seul ouvrage, mais selon moi si son trait avait quelques longueurs d'avance, ses représentations avaient quelques trains de retard... On peut effectivement évoquer le passage au Congo, mais je pense que dans chaque tome on pourrait retrouver des "details" illustrant cette mentalité et ces représentations plus ou moins héritées du colonialisme et du XIXe s.
Bonjour, concernant les 7 Boules de cristal, l'homme européen n'est pas forcément le plus civilisé. Il viole des tombes et s'empare de momies et de trésors. Avec les savants qui tombent dans un état de catalpsie, l'homme occidental est dépassé, il n'est pas le plus fort. Il est puni. J'ai relu, il y a deux ans, tous les albums, quel plaisir et pourtant je les connais par coeur. C'est mon grand-père qui m'a acheté mon premier Tintin: Le temple du soleil en 1970. Ce fut un souvenir de lecture indélébile. Bonne journée.
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