(BD) Lincoln
J'ai lu cette nuit les trois premiers tomes de la BD Lincoln, signée Olivier, Jérôme et Anne-Claire JOUVRAY.
Lincoln est un personnage aussi antipathique qu'attachant. Il n'a pas eu une chouette naissance, et son enfance ne lui a pas laissé le loisir d'avoir de grandes illusions sur la vie ici-bas. Ses trois premiers mots sonnent tout au long de sa courte vie comme un leitmotiv : "chier", "merde", "putain".
Lincoln est un cowboy qui n'a jamais gardé une vache. Un cowboy de western, autrement dit. C'est un gringalet à la mâchoire proéminente et au regard torve, qui aime à s'attirer des ennuis. Un provocateur grossier et mal léché. Un soûlard vaguement bagarreur qui finit toujours par se prendre un bon coup de santiag au cul.
Tout ça, jusqu'au jour où Dieu, habillé de l'éternel poncho et du divin sombrero qu'on lui connaît, lui tombe dessus, en pleine partie de pêche à la dynamite. S'ensuit un drôle de pacte, où Dieu refile 5 000 biftons à Lincoln, en échange de quoi celui-ci tolère pendant un moment de devenir l'objet d'expérimentations morales. Mais Dieu, dans sa mansuétude, a aussi donné à Lincoln l'immortalité, pensant que cela l'aiderait à changer de perspective sur la vie en général.
Lincoln se traîne ainsi, d'aventure en aventures, jouant aux cartes, provoquant des bagarres, se saoûlant, se faisant botter le cul, terminant ivre mort et amoché dans la gadoue des saloons.
Alors qu'il braque un train sous le regard éberlué de Dieu, voilà Satan qui s'amène, propose une tige à son collègue et le tourne en dérision. Plus tard, Lincoln accomplit un peu malgré lui son premier beau geste de justicier (en fait, un sale boulot de chasseur de prime), et le voilà affublé de trois nouveaux compères, fanatiques de son style inimitable. Ils deviendront ses apôtres, en quelque sorte.
Dans les deux volumes suivants, Satan revient à la charge, en soumettant Lincoln à la tentation. Mais Lincoln est aussi peu enthousiaste à servir Dieu, qu'à devenir le pigeon du diable. Après avoir laissé ses disciples dans un bled paumé où après le carnage, tout est à reconstruire, Lincoln s'en va malgré lui pour New York, en ce tout début de XXè siècle.
Un personnage et un cycle drôlement bien mené. Le dessin est admirable. Dieu ressemble à s'y méprendre à une créature de Larcenet. Lincoln est touchant d'obstination et de bêtise. Un quatrième tome existe, pourvu que je le dégote quelque part !
3 x 48 pages, www.bd-lincoln.com - 11 € chaque
5 commentaires:
Quand je pense que certains médias critiquent la multiplication des blogs parce que ce serait le signe le l'abandon pur et simple de la communication d'humain à humain. Quels cons !
Moi j'adore les blogs, surtout quand ils disent du bien de mes bouquins !
hé hé !!
Merci
Voilà un blog comme je les aime ! Précis, aimable, affectueux en un mot parfait !
hé hé
:)
Merci de votre passage...
Si je voulais rajouter une couche vaguement démago, je dirais : "moi j'adore les auteurs de BD, ils sont tous formidables, surtout quand ils ne méprisent pas l'avis de leurs lecteurs"
En effet et malheureusement, je ne citerai pas le nom d'un ou deux auteurs qui ces dernières années ont beaucoup produit, et qui ne tolèrent pas qu'on critique certaines de leurs BD sur la place publique (en l'occurrence, sur des blogs comme celui-ci). Sans doute parce que la critique, particulièrement lorsqu'elle est construite, donne des billes à leur mauvaise conscience.
C'est pas facile, je ne dis pas. Mais lorsque le lecteur argumente son jugement, je trouve un peu vachard de lui passer des coups de gueule pour qu'il se force à aimer, ou à se taire.
En tout cas, M. Olivier Jouvray, moi je trouve que vous faites du bon boulot, et je vous souhaite tous les bons côtés du succès, sans les mauvais...
Repassez par ici aussi souvent que vous le voulez : la section BD vous ouvre ses bras !
:)
Comment tu te la pètes ;)
Pff, et encore ça, c'est rien : cette nuit le fantôme de Proust est venu prendre le thé avec moi. Mais quand il a su que je n'avais plus de madeleines, il était furax, il est parti en claquant la porte.
Dans ma rue, Marcel Proust a buté sur un pavé qui lui rappelait Venise et par conséquent il a refait ses lacets, en pensant à Balbec, sans doute...
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