05 août 2007

Le Secret de la petite chambre

Nagai KAFÛ (1879-1959) est l'auteur présumé du "Secret de la petite chambre". Ce conte érotique japonais de dix-neuf pages est publié ici avec un autre texte court, "La Fille au chapeau rouge", attribué à Akutagawa RYÛNOSUKE (1892-1927).

Conte ou nouvelle ?
Faites-vous une différence entre le conte et la nouvelle ? Moi, oui. Tous deux sont des textes courts. Par rapport au roman, ils ont moins de personnages, des portraits psychologiques superficiels et une intrigue simplifiée. Mais pour moi le conte c'est l'histoire que le narrateur dit avoir entendue, ou trouvée, ou rêvée il y a longtemps, et qu'il ne nous livre qu'après une introduction se référant au moment même où il la consigne dans ses cahiers. Alors que la nouvelle peut commencer directement dans le cœur de l'action, le conte, selon moi, prend d'abord un moment pour nous expliquer qui raconte et dans quelles circonstances. Ainsi beaucoup de textes courts du XIXè s., en Occident, sont des contes, et au XXè s. des nouvelles. Les Racontars de J. Riel sont des contes, tout comme les chapitres de Demain les chiens de C.D. Simak.

L'histoire de ce conte érotique
"Le Secret de la petite chambre" est donc bien un conte érotique. Le narrateur, un homme nommé Kinpu Sanjin, se dit notre "serviteur". Alors qu'il se promenait un jour dans un quartier d'une ville qu'il ne nomme pas, il envisage une ancienne "maison de rendez-vous" (titre d'un roman de A. Robbe-Grillet) qui est actuellement à vendre. Il l'achète aussitôt, sans beaucoup réfléchir, discuter le prix ni tarder ; appelez ça le cri du Q. Cela indique en tout cas sa classe sociale : n'est pas érotophile qui veut dans une société hyper hiérarchisée.

En retapissant une petite pièce, dont la surface est approximativement de « quatre tatamis et demi », il découvre sur le papier des cloisons coulissantes « des lignes griffonnées d'une écriture serrée », dont il dira deux pages plus loin « je restai confondu devant tant d'inconvenances ! ». Ben voyons.

Quatre tatamis et demi d'ambition
Vous aurez remarqué comme le récit principal est amené grâce à un artifice qui pose un cadre licencieux (un ancien bordel) et met le récit à distance (un passé pas précisément daté) pour faire mine de ne pas en être responsable. D'ailleurs Kinpu Sanjin a acheté la bâtisse pour son "petit jardin", et non parce qu'il lui rappelle l'époque où lui-même fréquentait assidûment les maisons du jouir, évidemment.

Sans rien vous révéler de l'histoire inscrite sur les "cloisons coulissantes", ni des détails intimes du "petit jardin", sachez qu'il s'agit des amours d'un jeune homme avec une geisha, et de la méthode à suivre pour faire lâcher prise à toute femme qui se respecte dès la première nuit d'ébats. Tout un programme. La méthode semble aussi infaillible que le jeune homme, la psychologie de la geisha aussi prédéterminée que la structure du conte.


19 pages, coll. Picquier poche - 6 €
Pour plus d'informations, vous pouvez lire www.shunkin.net

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