Histoires des siècles futurs
Ce recueil épuisé de Jack LONDON (1876-1916) rassemble 5 nouvelles d'anticipation politique. Les récits évoquent chronologiquement la déchéance de l'être humain entre la fin du XIXè siècle et l'an 2734.
Adeptes de la science-fiction, passez votre chemin : Jack London n'écrit pas pour vous. Voyez plutôt chez Jules Verne, son contemporain en France. Le point de vue de London dans ce recueil est plutôt celui d'un Orwell, d'un Huxley, d'un Bond. Autrement dit, il ne s'agit nullement de fantasy, mais d'anticipation politique et économique.
Les cinq nouvelles ne se valent pas : la quatrième, "Un curieux fragment", est franchement ennuyeuse à mon goût. On n'est pas non plus ici en présence du plus grand livre du grand London. Non. Mais... "L'Ennemi du monde entier", "L'Invasion sans pareil", "Goliath" et surtout "La Peste écarlate" sont d'excellents récits. Composés dans une langue riche, on n'y voit pas les maladresses auxquelles on pourrait s'attendre de la part d'un auteur qui fait du "hors-jeu" littéraire.
La structure de ces nouvelles est implacable, les personnages, demi-dieux, sont fascinants. Les vies deviennent des destins en quelques lignes. L'arrière-fond, communiste, ne chante pas franchement des lendemains glorieux.
"La Peste écarlate" : en 2734, un vieillard raconte à ses trois petits enfants comment l'espèce humaine a failli disparaître toute entière du fait de la peste écarlate, quelques 70 années plus tôt. Le vieillard, James Howard Smith, ancien professeur de faculté, a été l'un des seuls êtres vivants à en réchapper. Lui et ses descendants vivent pour ainsi dire dans l'âge de pierre : aucune mémoire, tout pour l'instinct, et le refus d'enrichir le langage, cet outil négligeable à partir du moment où le bâton fait respecter la loi du plus fort...
315 pages, coll. 10/18 (non réédité) - 4 € en occasion
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Nota bene : "La Peste écarlate" est réédité seule chez Babel
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15 commentaires:
Tout à fait, tout à fait.
Je n'ai lu que quelques lignes d' "Un curieux fragment". Pas trouvé ça très captivant.
Par contre, j'ai été assez surprise par le London-visionnaire qui s'affirme dans les autres nouvelles. Je trouve que ses prévisions sur l'Asie sont très pertinentes et les recoupements sont parfois étonnants : le coup de l'éveil de la Chine et les différents rôles du Japon sont franchement bien vus. Bon, faut l'dire, au vu de l'actualité, on n'est pas complètement dans la réalisation de ses écrits, n'empêche qu'il a cerné finement les enjeux et les sources de tensions. Et il rattache également, à juste titre d'ailleurs, l'Occident à toutes les évolutions de la zone.
Et puis, cette épidémie qui décimerait une grande partie de l'humanité (on retrouve dans plusieurs nouvelles cette idée de maladie portée à grande échelle, si je m'en souviens bien)... Ca laisse à réfléchir, non ?
Enfin bon, pour résumer, j'ai trouvé très intéressantes ces nouvelles. Finalement, c'est un exercice assez éducateur que de les lire en gardant à l'esprit certains aspects de la situation économique et politique contemporaine. Voilà, quoi !
Bon ben... j'suis tenté de remplacer mon billet par ton commentaire... :'(
Merci pour ton commentaire. Comment se fait-il que tu aies lu ce recueil ??!!
Mais parce que je m'instruis, mon brave, même en vancances !
Plus sérieusement, j'ai emprunté à la bibli un gros pavé de textes de London. Le titre du recueil de nouvelles m'a bien inspirée et j'en avais déjà vaguement entendu parler. Et puis, comme je l'ai dit, je trouve ça intéressant de comparer certains écrits-plus-très-récents avec des situations bien ancrées dans notre quotidien et qu'on finit d'ailleurs par oublier, par accoutumance.
CQFD
Sinon, hors de question que mon commentaire devienne autre chose qu'un commentaire
WOuha, l'autre !
Elle se garde ses remarques pertinentes pour SON blog à ELLE, c'est SÛR !!
Blog dont ELLE s'est évidemment bien gardée de te donner l'adresse, des fois que tu essaierais de LUI faire concurrence ...
Pour en revenir à London, y'a un autre truc qui m'épate. Je ne sais pas si tu as pensé à la même chose en lisant, mais moi, je dis chapeau, parce que pour anticiper comme il le fait sur le futur, il faut surtout avoir une perception très fine et très pointue de son présent. Et ça, ben j'admire. Aujourd'hui, si on nous demandait de dresser un tableau de la situation politique et économique du siècle prochain, je pense qu'on partirait pas mal dans des délires de science-fiction avec, à la clé, des prédictions totalement folichonnes.
Tout ça pour dire que je trouve le travail de London assez impressionnant, au-delà du style et du détail, justement parce qu'il arrive à se recentrer sur son époque et ses enjeux, à cerner ce qui n'est encore que remous, pour ensuite se permettre de se projeter (je sais, je me répète, mais c'est par peur de ne pas être claire).
Donc je suis tout à fait d'accord avec toi : assimiler ces nouvelles à de la science-fiction serait très réducteur, je crois qu'elles représentent avant tout un boulot très intelligent et éclairé. Critique aussi.
Voilà, maintenant, c'est promis : j'arrête !
Tu es vexante... :'(
Mais pour l'amour de la littérature, continue !
:p
à relire pour ne pas oublier que l'histoire n'est que répétition...
Oui, c'est vrai, il y a un côté Planète des singes dans "La peste écarlate" : le retour de l'homme à l'âge de pierre, et en même temps un homme isolé a vécu AVANT cette époque dans un âge moderne...
"Adeptes de la science-fiction, passez votre chemin" ...
"Autrement dit, il ne s'agit nullement de fantasy" ...
Dites, la SF ne se limite pas à Star Wars ni à Harry Potter ou aux seigneurs des anneaux (et ces 2 derniers cas ne sont pas de la SF).
La SF est un genre très vaste, qui comprend tout un tas de domaine de prédilection. Et la projection dans un futur imaginé par un auteur en fait partie, comme d'ailleurs Orwell et Huxley en sont les parfaits exemples. La SF regorge de ce genre textes décrivant des sociétés futures, de demain ou de la fin des temps.
Ce recueil de London est donc de la science-fiction (même si ce mot n'existait pas quand il a été écrit), catégorie anticipation si vous voulez.
Ce n'est pas de la fantasy, là on est d'accord.
Bonsoir et merci de votre commentaire.
Eh bien NON, ce recueil de Jack London n'est pas de la science-fiction. Tout simplement parce qu'il n'y est aucunement question de science.
Mon billet stipule déjà clairement ce que vous confirmez ici : que London dans ce recueil est dans la même veine que Huxley ou (plus tard) Orwell.
Ça n'est pas plus de l'anticipation, d'ailleurs, si l'on veut être précis : c'est de l'uchronie, c'est-à-dire une projection dans un espace temps qui ne renvoie ni au futur ni au passé, mais plutôt à une sorte de présent parallèle, ou de temps indéterminé n'ayant qu'une réalité expérimentale.
Donc en résumé OUI, on peut assimiler ça vite fait à de l'anticipation. Par contre NON, désolé, l'anticipation n'a rien à voir avec la science-fiction.
Finalement, c'est un peu comme si vous me reprochiez de ne pas mettre mes torchons dans le bon tiroir.
London écrit de la SF, dites-vous ?
Dans ce cas je réponds avec le même aplomb que NON, pas du tout ! ! ! ! ! Il écrit du genre narratif catégorie SF ! ! ! (appréciez un peu mon art de la nuance, à moi aussi... ... )
Bref, trêve de faux débat, London comme Orwell se situent en dehors de tout classement générique, convenons-en.
... mais au fait, l'avez-vous lu ce recueil ? Est-ce tout ce que vous aviez à en dire ?
Pour être méthodique :
- Non, je n'ai pas lu ce recueil. Je suis tombé sur cet article complètement par hasard alors que je cherchais un raccourci que jamais... enfin bref. Mais votre description me donne prétexte à le lire, moi qui suis un amateur de SF devant l'éternel.
- Car pour moi (et pour d'autres), l'anticipation est une branche de la SF, comme la hard science, l'uchronie, la dystopie, le space opera et bien d'autres...
- Mais je ne voudrais pas entrer dans une querelle d'ayatollah. Les définitions de la SF sont multiples. Personnellement je pense que la vision scientifique est trop réductrice. Dans n'importe quelle histoire, les gens font de la science comme M. Jourdain faisait de la prose. Doit-on dire que toute fiction est science-fiction ?
Hé hé. Très amusant.
Donc vous m'avez quand même tenu l'argumentaire sur "OUI, ce recueil de London, c'est de la S.F."... alors que vous ne l'avez pas lu.
Et vous voulez vous montrer méthodique, c'est bien ça ?
:)
Au plaisir de vous lire à nouveau, en tout cas.
Certes je ne l'ai pas lu, mais j'ai pensé me fier à votre description. (peut-être ai-je mal fait ?)
Vous dites qu'il s'agit d'anticipation. Et vu le titre du recueil, je n'ai aucune raison de ne pas vous faire confiance.
Pour moi (et pour beaucoup d'autres), l'anticipation fait partie du vaste domaine de la science-fiction - concept qui est certes né avec les révolutions scientifiques et industrielles fin XIXe (bien que le terme date des années 1920), mais qui s'est considérablement enrichi depuis.
En tout cas je promets de me procurer ce recueil et de le lire as soon as possible...
Et de venir vous en parler.
Vous faites bien.
:)
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