05 février 2008

La Nuit de Valognes

Auteur très en vogue ces dernières années, ne quittant jamais vraiment la scène littéraire ni les plateaux de télévision, Eric-Emmanuel SCHMITT s'est rendu célèbre en 1991 avec une pièce écrite deux ans plus tôt, à l'âge de 29 ans : La Nuit de Valognes.

Cette pièce en trois actes, d'écriture néo-classique, est avant tout une réécriture du Dom Juan de Molière. Mais c'est aussi l'aboutissement, pour l'auteur, de multiples jeux d'écriture pratiqués depuis longtemps.

Dans la campagne du XVIIIè siècle, quelque part en France, d'anciennes victimes de Dom Juan sont réunies par l'une d'elles. L'implacable séducteur est lui-même sur le point d'arriver ; rendez-vous a été pris. Elles lui préparent un procès inéquitable, assorti d'une sanction impossible : le mariage, ou la Bastille.

Schmitt connaît son Dom Juan sur le bout des doigts, il sait quel animal est cet homme-là. Pas seulement dans la version de Molière, dont celle-ci est extrapolée, mais dans celle de Tirso de Molina, inventeur du personnage, de Mozart et Lorenzo Da Ponte qui créèrent l'opéra Don Giovanni, dans celle de Lenau aussi, pour la mélancolie et le lyrisme qui se dégagent de cette nuit d'insomnie.

Et puis il y a les autres influences. Quand Schmitt parle de Dom Juan comme d'un automate, je pense à Jacques parlant de son maître et, ô curieux hasard, j'apprend que l'auteur est le père d'une thèse sur Diderot... Quand les jeux de mots se multiplient jusqu'à en gaver le texte de clins d'yeux plus ou moins entendus (si tant est que ça puisse s'entendre, un clin d'œil), je pense à Cocteau, à Anouilh, à Giraudoux, qui eux aussi en abusèrent, lorsqu'ils réécrirent les mythes anciens au XXè siècle.

Jusqu'à la dernière réplique, c'est de la belle œuvre que cette pièce inaugurale d'une œuvre contemporaine. Même si les didascalies expliquent plus qu'elles n'indiquent, même si Dom Juan est fatigué et bavard, même si les portraits de femmes frôlent la caricature. La seule chose que je n'excuse pas à cette version, c'est d'avoir à ce point escamoté Sganarelle. Si Molière lui-même jouait ce rôle dans son Dom Juan à lui, c'est qu'on doit le regarder comme nécessaire au bon équilibre du mythe.


112 pages, coll. Magnard Lycée - 4,75 €
Le Dom Juan de Molière est ICI

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Alors moi, Schmitt, je peux pas. C'est confit de clichés. Non?

Nicolas a dit…

En toute modestie, j'avoue que je n'ai lu que La Nuit de Valognes, donc pas facile de te répondre.
Bon, euh... des clichés, oui, il y en a ici. Je ne suis pas certain qu'il comprenne grand chose aux femmes, en particulier, et la répartition des rôles le montre assez bien.
Mais les clichés, les clichés... C'est un vaste et subjectif sujet... :)

Anonyme a dit…

"no Marc Levy" je suis plutot d'accord... c'est osé

Nicolas a dit…

Tiens ! Zorglub !
Que fais-tu donc par ici ?
:)

Mes Lectures Le Blogue a dit…

Bonjour Nicolas, c'est latourneusedepage, j'ai été taguée, faut jouer ca l'air, pour mieux se connaitre ....
Alors je te tague, pour plus de renseignements va voir dans mon blog.

Nicolas a dit…

Merci pour le tague, mais j'ai décidé dès le début que ce blog ne parlerait pas de qui je suis, mais de ce que je lis. ;)
Ceci dit, je n'ai rien contre l'idée de faire connaissance entre blogueurs et lecteurs. Il suffit de continuer à se lire l'un l'autre et à s'écrire des commentaires, des conseils de lecture, des critiques aussi.
Je crois que ça en dira rapidement plus long sur nous.
Au plaisir de te lire... :)